Portrait de David, prof de médecine à Tromsø

Quand et pourquoi es-tu arrivé en Norvège ?
Je suis arrivé en Norvège pour la première fois le 10 mars 2020 pour des vacances. Je devais rester une semaine pour voir ma copine qui vivait ici, mais deux jours plus tard tout s’est arrêté avec le Covid. Le service dans lequel je travaillais comme interne en France a fermé, et je suis finalement resté à Tromsø 2 mois au lieu d’une semaine.
Au bout de 2 mois les services ont réouvert, je suis rentré travailler en France dans un département de pneumologie à Montpellier. Puis au bout de 6 mois je suis revenu à Tromsø pour finir mon internat ici.
Aujourd’hui ça fait 5 ans que je suis là. On s’est séparé avec ma compagne mais je suis resté. J’enseigne aux étudiants en médecine en santé publique, je fais de la recherche et je suis impliqué dans divers projets avec des organisations de santé à l’international.
Qu’est-ce qui te plaît de vivre à Tromsø ?
La qualité de vie, l’accès à la nature, le fait de pouvoir aller au travail en ski (rires). La chaleur sincère des Norvégiens. Tous les jours j’ai l’impression de découvrir quelque chose sur ce pays. Je viens de Montpellier donc je suis émerveillé par la neige.
Mon travail m’intéresse beaucoup. Tromsø occupe une position géographique singulière, ce qui en fait un lieu privilégié pour la recherche en médecine, notamment en santé publique. Les conditions climatiques extrêmes et les variations de lumière dans cette région offrent un cadre unique pour étudier leurs effets sur la santé.
Je me suis notamment penché sur les conséquences de l’exposition au froid sur lac santé des travailleurs des mines à ciel ouvert en Arctique, un enjeu nécessitant des stratégies adaptées pour préserver leur santé.
Tromsø est une ville assez…bipolaire ! C’est deux villes différentes en fait, entre hiver polaire et soleil de minuit en été. Quand tu sors de l’hiver tu viens d’avoir une longue nuit polaire, qui apporte une certaine sérénité. L’été est généreux avec beaucoup de lumière et (un peu plus) de beau temps, c’est génial.
Tu penses quoi du tourisme croissant à Tromsø, et est-ce que tu as fait des activités de tourisme ?
Il y a des flux importants de tourisme, concentré dans certains endroits comme Storgata. Mais ça ne m’apparait pas encore comme du tourisme de masse. Le souci c’est surtout au niveau de la conduite en voiture parce que les touristes ont beaucoup d’accidents. La conduite sur glace n’est pas maitrisée par les touristes.
J’ai fait la course de huskies, c’est hyper dépaysant. J’ai fait des sorties en bateau, j’ai vu les fjords quand ma famille est venue me rendre visite.
J’ai vu pas mal d’aurores boréales aussi, mais plutôt par hasard. Juste il y a deux jours j’en ai vu des magnifiques de la montagne où je skiais.

Tu postes sur ton compte Instagram @david_peycos des photos de ski incroyables. Tu fais quoi comme type de ski ?
J’adore le ski de randonnée. Après le travail je monte avec les peaux, et je fais un sommet en 2-3 heures et je redescends. On part entre amis ou on trouve des gens intéressés sur des groupes spéciaux, pour ne pas partir seul pour des questions de sécurité. On fait des expéditions de ski aussi de nuit, avec nos lampes. Quand on va skier de nuit on a l’impression d’être sur la lune.
Si tu veux apprécier pleinement Tromsø et vivre ici, il faut avoir comme intérêt d’aller dans la nature. Sinon ça risque d’être rude surtout en hiver. La période que je préfère pour le ski c’est en mars parce que les journées sont plus longues, il fait grand soleil, et il y a encore dans la neige. Il n’y a pas beaucoup d’endroits dans le monde où tu peux faire 10 minutes de voiture et avoir accès à une nature si sauvage. Tu croises des rennes et des élans. Par contre c’est aussi une nature dangereuse, il faut être très prudent quand on sort, et vérifier les risques d’avalanche. La notion de sécurité est très importante en ski de randonnée, on vérifie toujours la météo, et on part avec une pelle, une sonde et un traqueur DVA. Il arrive que des gens meurent en montagne ici, malheureusement des touristes qui prennent parfois des risques inconsidérés.

Comment as-tu été accueilli en tant que médecin français ?
Très bien surtout que je suis arrivé en période Covid. En Norvège il y a moins de hiérarchie, moins de différences salariales, moins de « prestige » à être médecin, ce qui me plaît. On est deux médecins français à Tromsø. L’autre est rhumatologue, il exerce à l’hôpital universitaire.
On vit dans une des rares zones d’Europe ou il faut parfois rouler plusieurs heures pour trouver un hôpital, surtout en dehors des zones urbanisées par exemple dans le Finnmark.
J’ai aussi rencontré d’autres Français super intéressants. Un Français qui a ouvert un stand de crêpes à Tromsø. Un couple qui a ouvert près de Skjervøy un lieu expédition et hébergement pour voir les baleines, des chercheurs à l’université. Beaucoup de profils singuliers s’installent à Tromsø.
Est-ce que tu comptes rester ici, est quels sont tes projets professionnels ?
Je n’ai pas envie de quitter Tromsø. J’aime la recherche en médecine mais j’aimerais retourner à la clinique, tout en ayant un pied dans le milieu universitaire. C’est stimulant intellectuellement d’enseigner mais j’aimerais aussi avoir des patients, par exemple au Service de santé pour les réfugiés.
Pour finir, quel est ton endroit préféré en Norvège ?
Probablement Senja, notamment à Mefjordvær. Tu vas dormir là-bas, tu as en face Segla, une montagne emblématique. J’y vais en hiver et en été.
Un autre endroit que j’aime beaucoup est Hardangerfjord. Et monter autour du
glacier du parc national de Folgefonn. C’est un des plus gros glaciers de Norvège, vers Trolltunga.
